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COVID 19 : COMPRENDRE, ACCEPTER ET VIVRE L’INCERTITUDE – (Avril 2020)

Face à la crise que nous traversons, nous avons évoqué, dans notre précédent numéro, comment les émotions que nous ressentons d’une part, et l’abondance des informations que nous avons à traiter d’autre part, peuvent nous amener à nous extraire d’une approche rationnelle de la réalité, et obérer ainsi notre capacité d’analyse et de réaction (ou plutôt d’action…).

Le contexte d’incertitude dans lequel nous évoluons provoque, lui aussi, un impact fort sur la manière dont nous pouvons aborder ces événements.
C’est cette gestion de l’incertitude – antidote à l’indécision ou, à l’inverse, à l’excès de confiance – que nous allons développer dans les lignes qui suivent, ouvrant ainsi des pistes qui permettront de faire face à ces manifestations somme toute très « naturelles » !

  • L’incertitude

► L’approche générale

Dans le monde du « business », l’on dit souvent que les meilleurs leaders acceptent l’incertitude. Mais qu’est-ce que cela signifie réellement ?
Accepter l’incertitude consiste à savoir ce que l’on sait, savoir ce que l’on ne sait pas et ce que l’on ne peut pas savoir, et pouvoir faire la différence entre ces deux approches.
Naviguer dans une mer d’incertitudes fait partie intégrante des affaires modernes, même dans un contexte de stabilité et de continuité macroéconomiques, à tel point qu’il devient de plus en plus difficile de surprendre les dirigeants de nos jours. Pour preuve, les réactions potentielles à ce que l’on considérait comme des « cygnes noirs » il y a à peine une génération sont aujourd’hui intégrées à la plupart des scénarios stratégiques.

 


L’horizon temporel face à l’incertitude

► Dans le cas de la crise actuelle

Cependant, la pandémie du COVID-19 est une véritable anomalie qui nous demande de revoir, à plus ou moins grande échelle, notre cadre de référence. L’acceptation de ce « recadrage » fondamental – que l’on décrit largement comme étant la « nouvelle normalité » – signifie prendre pleinement en compte l’incertitude et l’intégrer dans notre prise de décision.

  • Les pistes possibles

Pour arriver à gérer au mieux cette crise, voici quelques clés que nous vous proposons :

► Traiter l’incertitude selon différents horizons temporels

Les incertitudes et les conséquences à court terme du COVID-19 sont totalement différentes des incertitudes et des conséquences à moyen et à long terme de la pandémie.
Selon l’endroit dans le monde où l’on vit et le secteur d’activité dans lequel on intervient, on se demande actuellement soit combien de temps cela va durer, soit de quelle nature pourrait être la reprise et quels en seront les contours. Quels secteurs vont prendre de l’essor ? Quels secteurs vont souffrir ? Comment notre expérience collective de la pandémie remodèlera-t-elle les affaires, la société et la politique ? De quoi sera faite la « nouvelle normalité » ?
Les habitudes qui gagnent en popularité ou que l’on doit adopter dans le contexte du COVID-19, comme les achats en ligne, le télétravail et la distanciation physique, vont-elles persister ou être délaissées ? Pour avoir du succès à long terme, il est incontestablement nécessaire de continuer d’être attentif aux réactions et à la reprise et de prospérer ainsi au-delà des phases de la pandémie.

► Cerner les incertitudes les plus prééminentes pour notre secteur

Il est facile de se laisser emporter par l’ampleur de l’incertitude qui entoure le COVID-19 ; ainsi, tout pourrait sembler incertain.
Pourtant, les décideurs doivent impérativement comprendre quelles sont les interrogations les plus importantes pour leur entreprise ou leur organisation, à l’intérieur des échéanciers qu’ils se fixent.
Dans l’immédiat, cela signifie qu’il faut comprendre et pondérer les répercussions de la pandémie compte tenu des perspectives sanitaires et économiques incertaines, puis évaluer leur interaction avec les dimensions essentielles comme la continuité de l’exploitation, les liquidités, l’utilisation des actifs et le redéploiement.
À moyen et long terme, il sera sans doute impératif de se concentrer sur les facteurs qui influencent la stratégie, la situation et la capacité de résilience d’une entreprise, son offre et sa demande, sa dynamique concurrentielle. Des changements structurels généralisés doivent être envisagés, parallèlement aux modifications règlementaires qui pourraient s’appliquer aux secteurs et aux écosystèmes pertinents de l’entreprise.

► Utiliser les incertitudes pour imaginer plusieurs avenirs

Accepter l’incertitude signifie que nous devons reconnaître que nous n’avons aucune certitude quant à ce que l’avenir nous réserve… Nous devons donc être à l’aise avec cette idée ! La clé consiste à imaginer, envisager des avenirs opposés, que ce soit à court ou à long terme.
La méthode la plus éprouvée et la plus efficace pour ce faire est l’utilisation de scénarios. Comme l’indique une note de la Harvard Business School sur ce sujet, « [les scénarios] sont différentes hypothèses plausibles décrivant ce qui est susceptible d’arriver et qui sont conçues expressément pour faire ressortir les risques et les occasions qui se présentent pour l’organisation. Les scénarios efficaces mettent la réflexion à l’épreuve en instillant une critique approfondie des nombreux facteurs qui peuvent façonner l’avenir ».


L’exploration des scénarios

A titre d’exemple, si nous avions eu en main des scénarios sur l’avenir de la mobilité avant que ne frappe le COVID-19, nous aurions peut-être pu jumeler la prolifération rapide des véhicules autonomes et l’augmentation des solutions de transport partagé et imaginer des avenirs possibles très différents, que ce soit pour les villes, pour les fabricants d’équipement automobile d’origine ou pour d’autres intervenants de l’écosystème de la mobilité.
Dans le cas du COVID-19, nous pourrions plutôt commencer par évaluer les différents facteurs sanitaires et économiques qui peuvent donner une idée de la durée et de l’ampleur possibles du choc économique, puis de la reprise potentielle. À long terme, nous pourrions tenir compte du modèle ultime de la transmission de la maladie, du niveau de collaboration entre les pays et à l’intérieur de ceux-ci, de la reconfiguration possible des chaînes d’approvisionnement et des vagues d’innovation que le COVID-19 pourrait déclencher.
Puisque tous ces indicateurs sont hautement incertains en ce moment, nous avons besoin de l’approche rigoureuse de la conception de scénarios pour nous aider à modéliser et à examiner la façon dont ces facteurs peuvent interagir de manière attendue, inattendue et possiblement extrême.
Fait important, les scénarios ne sont ni des prédictions exactes de l’avenir ni de simples analyses de sensibilité montrant la déviation progressive possible d’une entreprise par rapport à un scénario de base. Fondamentalement, les meilleurs scénarios sont des histoires cohérentes qui poussent les leaders à tenir compte des différentes évolutions possibles du contexte.

► Rechercher des points de vue différents

S’il y a un moment privilégié pour intégrer des points de vue différents dans la prise de décisions, c’est bien aujourd’hui, non dans le but de ralentir le processus, mais bien de l’améliorer.
Peter Schwartz, futurologue et cofondateur de Global Business Network, notait à juste titre : « La diversité a vraiment son importance. C’est une très bonne idée d’inviter des gens qui vous dérangent à discuter avec vous. »


La diversité des points de vue

Cherchons à obtenir le point de vue des plus jeunes et des gens qui œuvrent à l’extérieur de notre secteur d’activité, région ou entreprise. Identifions ceux avec qui nous sommes en désaccord ou qui ont une opinion différente de la nôtre et inspirons-nous de leurs idées. Cherchons à comprendre les points de vue de ces personnes et la logique qui étaye leur vision de l’avenir. Et enfin, collaborons chaque fois que cela est possible avec les partenaires de notre chaîne d’approvisionnement et de notre écosystème pour harmoniser nos variables et résultats potentiels.

► Intégrer des scénarios dans la prise de décisions

Les scénarios sont intéressants en soi, mais leur pleine puissance se révèle dans leur capacité à améliorer la prise de décisions.
Durant la crise du COVID-19, on utilisera naturellement les scénarios pour des simulations de crise sur les activités, les stratégies actuelles, les investissements, la solidité financière et les prévisions. Quelle est la résistance de chacun des scénarios dans des situations futures différentes, mais plausibles ?
Les scénarios peuvent aussi servir à provoquer la prise en compte de multiples possibilités. Quelques exemples : quels modèles économiques (au sens, économie d’entreprise) pourraient émerger à court et à long terme ? Que faudra-t-il pour gagner dans des situations futures différentes ? Quels investissements – en capacités, innovations, fusions et acquisitions ou partenariats – peuvent être accomplis pour renforcer la position concurrentielle future d’une entreprise ?
Au bout du compte, les scénarios peuvent servir à vérifier la pérennité de nouvelles stratégies et options et, à mesure que les dirigeants évaluent les orientations stratégiques possibles, aider à examiner la viabilité de ces options selon différentes projections de l’avenir. Bien entendu, les meilleures discussions à propos d’un scénario et de ses incidences explorent les risques et les occasions.

► Distinguer les incidences

Lorsqu’ils se penchent sur une série de situations futures plausibles, les dirigeants ont la possibilité de distinguer expressément différents types de décisions. Tous les choix ne sont pas égaux ; la création et l’exploration de différents scénarios peuvent aider à évaluer et à extrapoler les incidences d’un éventail de « gestes » possibles :

  • Gestes nécessaires – choix ou actions qui doivent être appliqués pour assurer la viabilité de l’organisation à court terme ;
  • Gestes sans regrets – choix ou actions qui ont du sens, quel que soit le scénario ;
  • Paris audacieux – choix ou investissements substantiels faits maintenant, dans l’espoir ou l’attente qu’un ou plusieurs des scénarios s’enclenchent (ou qu’ils soient amenés à s’enclencher) ;
  • Gestes conditionnels – gestes qui dépendent de l’enclenchement d’un ou de plusieurs des scénarios ;
  • Gestes satellites – gestes ou investissements plus discrets effectués de façon choisie à l’intérieur d’un ou de plusieurs des scénarios, en relation avec des paris audacieux.

Il n’y a pas de formule magique pour bien doser les gestes qu’une organisation doit poser. Ce que l’on sait, c’est que les meilleures stratégies décrivent clairement la nature des choix effectués et des gestes qui doivent être posés, et qu’elles impliquent généralement une forme d’engagement ou de pari important ; après tout, on ne peut pas réussir sans prendre de risque.
Bien entendu, dans le contexte actuel, de nombreuses entreprises doivent poser des gestes nécessaires et des gestes sans regrets, et elles doivent le faire avec détermination et conviction. Les autres gestes s’y ajouteront de manière appropriée à l’aide des ressources disponibles, et en tenant compte de la tolérance globale au risque.
Selon nous, il est déterminant que tout choix soit appliqué très proactivement (avec toutes les ressources voulues et sans demi-mesures) sur la base d’une logique limpide et vérifiable, afin qu’il puisse être ajusté ou abandonné s’il devient évident que les conditions préalables à son succès ne seront probablement pas remplies.

► Faire des choix et exercer une surveillance

Au bout du compte, il faudra faire des choix : continuer de faire certaines choses mais pas d’autres, faire des investissements ou les reporter, réaffecter des actifs, garder fermement le cap, ou investir pour l’avenir avec ou sans réserve.
Faire face à l’incertitude ne rendra pas les décisions moins difficiles, mais devrait contribuer à éclaircir certains compromis, certaines hypothèses et, en définitive, renforcer nos convictions. De plus, avoir une vision claire des scénarios qui s’appliquent à une entreprise aide à repérer les indicateurs qui doivent être surveillés afin d’avoir une idée de l’évolution du contexte commercial, de confirmer la validité d’une stratégie ou d’un ensemble de gestes, ou de constater qu’il faut les ajuster.
Les scénarios attirent l’attention sur les indicateurs qui doivent être observés de façon structurée. Certains outils de détection peuvent permettre de percevoir de faibles signaux qui semblent moins plausibles à première vue, mais qui peuvent « changer la donne ».
C’est pourquoi la surveillance objective revêt une importance capitale pour les dirigeants d’entreprise en temps de crise. Actuellement, nous surveillons de près les indicateurs de la propagation et de l’endiguement du virus, et les indicateurs sanitaires, psychologiques, financiers et économiques qui peuvent laisser entrevoir la nature et le rythme d’une potentielle reprise. Les dirigeants doivent aussi absolument repérer les indicateurs pertinents pour leur secteur et leur entreprise et les suivre de près, afin de voir si l’un de leurs scénarios pourrait se matérialiser, de façon attendue … ou inattendue.

 

… De quoi nous occuper pendant le confinement !

 

Continuez à prendre soin de vous et rendez-vous le mois prochain !

Ils nous font confiance