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Le cycle de l’Autonomie (Avril 2012)

 

L’objectif souvent affiché par les managers que nous rencontrons est de se voir entourés d’équipes « autonomes ».

Première remarque : derrière ce mot se cachent différentes interprétations possibles, souvent liées à la propre perception du manager, à celle de ses collaborateurs et à la culture de l’entreprise dans laquelle ils évoluent. Il convient donc de s’entendre sur le sens donné à ce vocable.

Par ailleurs, il est important de noter que l’individu, tant dans sa vie personnelle que professionnelle, passe par différentes phases, incontournables, avant d’accéder à l’autonomie. Ce processus de croissance constitue ce que Nola Katherine Symor (Les Classiques de l’Analyse Transactionnelle – Volume 3) a appelé « le cycle de la dépendance ».

Connaître et comprendre ces différentes étapes permet d’aider les managers à accompagner le développement professionnel de leurs collaborateurs. En effet, dès que se pose la question de la délégation, du travail en équipe ou du rapport hiérarchique, il est important d’avoir à l’esprit ces différentes phases.

Les différents stades de l’Autonomie

Nola Katherine Symor distingue quatre étapes, qui se déroulent selon un « processus cyclique » se déroulant en « spirale ». A chaque fois qu’une étape est franchie, « les cycles suivants se déroulent sur un rythme plus rapide ». C’est ainsi que le premier cycle peut prendre plusieurs années, alors que les cycles suivants seront franchis en quelques jours… voire quelques minutes !

La dépendance

Cette étape, également appelée « symbiose », est présente de façon tout à fait naturelle au début de la vie (le nouveau-né est entièrement dépendant de ses parents ou de ses figures tutélaires), puis s’estompe petit à petit dans la mesure où le développement de l’enfant se fait « normalement » avec l’acquisition progressive de nouvelles compétences.

Le parallèle peut être fait avec le monde de l’entreprise : le jeune diplômé fraîchement recruté, le collaborateur prenant de nouvelles fonctions vont se trouver, pour un temps plus ou moins long, dans une phase de dépendance vis-à-vis de leur manager, de leurs  collègues plus « anciens » : c’est auprès d’eux qu’ils vont devoir, en effet, prendre connaissance de leur poste de travail et leur marge de manœuvre en termes de prise de décision sera probablement limitée.

Etape saine lorsqu’elle se déroule sur un temps réduit (bien que, encore une fois, ce laps de temps puisse être plus ou moins long en fonction des personnes et du contexte), elle ne doit pas être prolongée excessivement sous peine de générer des collaborateurs par trop « soumis ». Reste à savoir si cette éventuelle anomalie provient du collaborateur (manque de confiance en soi, ou tout simplement incompétence), du manager (style autocratique par trop directif) ou de la structure d’entreprise (très pyramidale).

La contre-dépendance

Afin de sortir de son état de dépendance, la personne va devoir se séparer de sa figure tutélaire (père, mère, manager…), et pour cela, va entrer dans un processus d’opposition.

Ce processus est bien connu des parents de jeunes enfants (aux alentours des 2 ans, le « non » systématique) et de ceux d’adolescents, deux périodes de la vie propices à l’installation d’une contre-dépendance.

Dans l’entreprise, cette étape est intéressante dans la mesure où la personne va, en se démarquant de sa figure tutélaire, forger sa propre identité professionnelle, mais elle peut être difficile à vivre pour le supérieur hiérarchique, car le recadrage sévère ne fera qu’accroître la rébellion.

Or, dans un tel contexte, la contre-dépendance qui se prolongerait trop longtemps avec un positionnement « rebelle » systématique serait préjudiciable au bon fonctionnement de l’équipe d’une part, et de l’entreprise d’autre part.

L’indépendance

L’indépendance est, d’après le Larousse, « l’état d’un personne qui ne dépend d’aucune autorité, libre, qui refuse les contraintes, les influences, les règles établies ».

Ainsi, un jeune adulte accède à l’indépendance le jour où il a un salaire, habite sous  son propre toit, ne dépend plus financièrement de ses parents et surtout, se concentre sur sa propre loi : « Je vais enfin recevoir qui je veux, quand je veux ! ».

En entreprise, le collaborateur « indépendant » est propice à l’individualisme : il ne demande rien à son manager, ne rend pas compte, voire refuse tout contrôle. Situation qui peut sembler confortable au manager (« je n’ai pas à m’occuper de lui ou elle ») mais qui peut vite dégénérer, les électrons libres étant fort difficiles à gérer !

L’interdépendance

On a tendance, dans le langage courant, « à identifier autonomie et indépendance, et à considérer une personne autonome comme quelqu’un qui est capable de se débrouiller seul » (Vincent Lenhardt, « Les Responsables porteurs de sens »).

Or, nous avons vu plus haut à quoi correspondait l’indépendance et les limites que ce stade comportait. Alors, comment peut-on définir l’autonomie ? D’après Eric Berne dans « Des jeux et des hommes », « l’autonomie se manifeste par la libération ou le recouvrement de trois facultés : la conscience, la spontanéité, l’intimité… La conscience implique le fait d’exister dans l’ici et le maintenant…, la spontanéité signifie choix, liberté de choisir et d’exprimer ses propres sentiments parmi la collection disponible…, l’intimité, c’est la sincérité spontanée, débarrassée du jeu [psychologique], d’un être conscient… ».

Etre autonome ne signifie donc pas « vivre sa vie » indépendamment des autres. Le stade de l’autonomie, ou interdépendance d’après Nola Katherine Symor, est au contraire celui où la personne est pleinement elle-même, étant à la fois capable de se « débrouiller » seule, mais aussi de communiquer et d’interagir avec les autres dans une relation d’égal à égal, ou, si l’on préfère, gagnant-gagnant.

En entreprise, le collaborateur ayant atteint ce stade travaille facilement en équipe, apportant  sa compétence, assumant ses responsabilités et acceptant les retours qui peuvent lui être faits comme des axes de progrès.

Situation « idéale » lorsque tous les collaborateurs, au sein d’une même équipe, et y compris le manager, ont atteint le stade de l’interdépendance. Dans la réalité, il est fréquent de rencontrer des personnes se trouvant dans des phases de développement différentes ; ceci d’autant plus que le stade d’interdépendance n’est nullement figé : un changement de fonction, par exemple, peut faire revenir, momentanément, une personne au stade de dépendance, puis l’amener à dérouler l’ensemble du cycle ; seule la durée sera différente, avec un passage d’un stade à l’autre en général plus rapide.

Conclusion : Comment favoriser l’accès à l’interdépendance de nos collaborateurs ?

En communiquant, en faisant confiance, en donnant des responsabilités (sans négliger le contrôle), et surtout en donnant du Sens par le partage d’une vision.  Cette vision partagée, faite d’objectifs, de valeurs, d’expériences  communes – ce que Vincent Lenhardt appelle une Enveloppe Culturelle Minimale – contribue à l’accès à l’autonomie des membres de l’équipe.

Références :
Eric Berne : Des Jeux et des Hommes – Editions Stock
Nola Katherine Symor : Les Classiques de l’Analyse Transactionnelle – Volume 3
Vincent Lenhardt : Les Responsables porteurs de Sens – Editions INSEP CONSULTING

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