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Du management d’entreprise au management associatif : Modélisation ou Déclinaison ? – 2ème partie (Juillet et Août 2017)

LES RELATIONS BÉNÉVOLES / SALARIÉS DANS LE CONTEXTE ASSOCIATIF

La professionnalisation des associations rend de plus en plus obligatoire et nécessaire une transparence sur les modes de fonctionnements internes. Bénévoles et salariés doivent travailler ni en indépendance, ni en dépendance mais en interdépendance. Deux grandes problématiques sont à éviter :

  • Les bénévoles sont appelés à faire œuvre « d’auto-conviction » quant au fait que, au-delà de l’engagement et du temps qu’ils consacrent à l’association, ils demeurent … bénévoles ! Cette activité n’est pas leur métier. Bien évidemment, ils apportent leurs expertises, leurs contributions mais doivent garder présent à l’esprit l’objectif premier qui est le leur : prôner et développer la dimension éthique de l’association. Les membres du « bureau » (président, trésorier, secrétaire) ont bien entendu un périmètre plus large et plus impliquant en particulier dans les domaines de la gestion et des finances aux fins d’assurer la pérennité économique de l’association ; ils sont également appelés à encourager la promotion des valeurs dont l’association est porteuse ; ils sont les garants de la vision d’ensemble de la structure. Tout bénévole ne doit se départir du principe qui veut que la dimension « amicale » où chacun fait ce qu’il veut (ou ce qu’il peut …) ne convient plus dès lors que la taille (le nombre d’adhérents, la nature et le volume des activités, l’implantation, …) devient par trop importante. Pour porter l’objet social au plus haut niveau de valeur tel qu’attendu, il est nécessaire de laisser la place à des personnes dont c’est le métier. Cette équation de bon sens est cependant difficile à mettre en œuvre de par la dimension humaine de l’engagement des bénévoles en lien avec leurs différentes aspirations et motivations.
  • Les salariés doivent, dans ce contexte, intégrer leur métier comme étant au service des bénévoles, membres de l’association. En termes économiques, ces derniers apportent une externalité positive non monétisée (leur temps, leur expérience, leur savoir-faire, leurs contacts). Le rôle des salariés consiste à faciliter la mise en œuvre des apports de ces bénévoles en reconnaissance du temps apporté au développement de l’association. Lesdits salariés sont attendus, en regard des fonctions et responsabilités des administrateurs, sur la génération, la recherche et la remontée d’informations pertinentes qui permettra aux élus une prise de décision stratégique. Phénomène relativement récent, la professionnalisation des structures associatives s’accompagne souvent d’une informatisation des données et des processus facilitant l’action mais favorisant parfois une rétention d’information de la part des salariés à « l’encontre » des bénévoles. Précisons, s’il en est besoin, que les associations ayant correctement géré ce passage et, par voie de conséquence, la qualité de la communication interne, ont pu mieux que les autres bénéficier des effets positifs d’une professionnalisation des structures.

Ainsi, cet équilibre salariés/ bénévoles connaît trois moments clés :

  • L’arrivée du premier salarié, qui modifie l’ensemble du dispositif puisque l’on passe d’une structure entièrement bénévole à une structure alliant les deux univers que sont le bénévolat et le salariat ;
  • Le traitement informatique des données et des processus (fichier des membres, comptabilité, Internet, emailing, délégations d’actes, cotisations, …) qui modifie sensiblement les modes de travail et de partage de l’information
  • Le point de bascule, pour les associations numériquement importantes, qui voit l’équivalent temps plein salarié devenir quantitativement plus important que l’équivalent temps plein bénévole.

Ces trois moments sont clés car ils modifient la nature des relations interpersonnelles au sein de l’organisation. Il s’agit donc de reconstruire et/ou consolider un équilibre … fragile ! Vouloir appréhender cet équilibre bénévoles/salariés nous conduit à définir plus fondamentalement le principe d’autorité au sein d’une association. Sachant que l’un des écueils managériaux d’une structure associative réside dans la difficile conciliation entre des approches parfois différentes, ce principe d’autorité devient l’élément structurant du management associatif.

AUTORITE ET LEGITIMITE

Il n’est moralement pas acceptable de parler de « pouvoir » dans une association ! Ainsi, est-il de bon ton d’expliquer que l’on « ne vient pas pour ça » lorsque l’on s’investit dans une telle structure. Le travail réalisé, y compris par et pour les bénévoles, n’en reste pas moins un exercice du pouvoir. En effet, celui-ci est essentiellement centré sur la capacité à rassembler et orienter les membres de l’institution dans l’objectif de promouvoir une vision et le fonctionnement de l’association qui la sous-tend. Dans ce contexte, il est aisé de comprendre l’importance des processus d’influence ; souvent peu visibles, leur prise en compte dans le cadre de la réflexion que nous menons est essentielle. Rappelons que certains auteurs (Max Weber, Hannah Arendt) ont largement démontré que le pouvoir ne pouvait s’exonérer d’une légitimité (le lien étymologique entre autorité et légitimité est sémiologiquement connu). Au regard de cette approche et selon ces mêmes auteurs, l’autorité peut revêtir trois formes distinctes :

  • L’autorité institutionnelle (les statuts, le règlement intérieur, le mandat électif, l’assemblée générale, …),
  • L’autorité charismatique (l’identité, la mise en œuvre des savoir-être tels la capacité à convaincre, …),
  • L’autorité technique (le savoir, le savoir-faire, l’expertise, …).

Dans un contexte associatif, la légitimité peut donc s’obtenir à travers l’une de ces trois sources d’autorité. Les administrateurs se fondent traditionnellement sur l’autorité institutionnelle en tant qu’élus ; les salariés sur la légitimité technique (ils ont été embauchés sur un CV, des compétences).

Trois incidences directes en résonnance avec cette approche :

  • L’autorité charismatique, comme l’influence, peut être un attribut des bénévoles comme des permanents, c’est donc une autorité en regard de laquelle existe une « concurrence » potentielle ;
  • Les salariés se verraient bien avoir une légitimité institutionnelle via leur statut, leurs responsabilités, l’accès à certaines informations réservées au bureau ou au conseil d’administration ;
  • Les bénévoles ont souvent adhéré, en dehors de l’intérêt pour la cause, pour apporter leur expertise en particulier dans le domaine professionnel qui est le leur. Le fait que les salariés aient une mission proche voire identique (ce qui est logique puisqu’ils sont là pour exercer leur métier) peut créer à nouveau, sur les zones de recouvrement, une tension liée à la concurrence des ressources.

Il convient, pour tenter de lever cette éventuelle ambigüité, de positionner la nature du champ d’intervention de chaque statut : les salariés exercent une fonction dans un cadre contractuel et les bénévoles procèdent d’une implication dans un cadre de libre choix.

QUELQUES PISTES OPERATIONNELLES

Quelles pistes peut-on alors explorer pour contourner ces écueils ? Là encore, les réponses se trouvent au cœur des spécificités des associations. Trois grandes solutions peuvent être mobilisées en tenant compte de ces mêmes spécificités associatives qui en font leur richesse et leur complexité.

1 – INSTAURER UN PRINCIPE D’AUTORITÉ NORMATIF ET D’ÉQUILIBRE

L’univers associatif doit permettre de trouver des solutions simples mais normées qui offrent à tous la possibilité d’un cadre protecteur dans un esprit positif (celui qui doit prévaloir cet univers). Pour cela les deux populations travaillant ensemble doivent poser les bases d’une collaboration équilibrée. Chacun doit progresser là où il est attendu. Aux administrateurs de décider des axes stratégiques, de savoir déléguer et de contrôler/sanctionner si des objectifs ne sont pas atteints ou si les moyens ad hoc n’ont pas été mis en œuvre dans le cadre des ressources à disposition. Aux salariés d’être force de proposition au service des bénévoles et de l’objet de l’association, de faire circuler l’information auprès des élus. Dans ces conditions, la délégation et l’autonomie seront pour eux garanties.

2 – REMETTRE LE PROJET ASSOCIATIF ET LES VALEURS AU CENTRE

Si la nature des associations, leurs valeurs et systèmes hiérarchiques sont sources de complexité managériale, le projet associatif (et les spécificités du secteur) sont des éléments structurants de ces activités. « L’étendard » du projet associatif en est le meilleur élément de concordance. Les valeurs et la vision sont très souvent mieux partagées dans les associations que dans d’autres environnements. La volonté, normalement élevée chez les bénévoles, de voir aboutir le projet associatif contribue à favoriser une convergence favorisant l’implication et l’engagement.

3 –NE PAS PROCEDER A UNE CONFUSION DES GENRES

Les salariés assurent la « permanence » et la stabilité de l’association au-delà de l’engagement bénévole volatile et limité dans le temps. Les bénévoles sont présents pour assurer et garantir le respect des valeurs éthiques, parer les éventuelles dérives et apporter leur contribution. Les administrateurs doivent contrôler les évolutions et définir une vision sans toutefois s’enliser dans des stratégies à court terme et claniques. Une répartition des rôles bien établie est souvent le meilleur moyen de clarifier la situation même si parfois les dispositifs a posteriori sont parfois difficiles à mettre en œuvre.

Ces trois pistes (principe d’autorité, projet associatif et précision des rôles) peuvent permettre de gérer à la fois crises de croissance et professionnalisation des associations. Car l’enjeu est bien ici ! Les associations emploient un salarié sur vingt (chiffres INSEE 2016) en France et tendent vers une professionnalisation croissante. C’est aussi une formidable chance de développement de métiers et secteurs nouveaux. Les difficultés de management demeurent un handicap majeur face à cette croissance : les administrateurs ne sont pas toujours armés pour relever ces défis (manque de temps, absence de management dans leur vie professionnelle, difficulté à séparer engagement militant des bénévoles et carrière professionnelle des salariés).

Considérant que l’économie sociale et les associations ne cessent de voir leur influence grandir depuis plus de vingt ans, la professionnalisation de ce secteur passe obligatoirement par la prise en compte de la dimension managériale dont on sait qu’elle constitue, peut-être ici plus qu’ailleurs, le socle de la réussite.

Bonnes vacances à tous et rendez-vous en septembre !

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