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Les seniors en entreprise – 2ème Partie (Juin 2011)

 

On l’aura bien compris, à la lecture du précédent numéro de notre lettre : si le poids économique de l’emploi des seniors reste un paramètre très important de la problématique évoquée, la dimension humaine apparaît comme essentielle non seulement aux auteurs de ces lignes mais, plus généralement, à tout responsable qui  doit prendre en compte les enjeux de cette situation.

Analysons ensemble les trois composantes fondatrices de la démarche :   

1. Stéréotypes et représentations

Distinguons brièvement quelques stéréotypes mis en exergue dans ce propos de par la fréquence de leur évocation* :

    • Une moindre productivité due à l’âge et à « l’usure du temps » (sic),
    • Un risque d’obsolescence des compétences nécessitant de former des collaborateurs en regard d’un métier qui a évolué … ou qui n’existe plus,
    • Des coûts générés par cette adaptation,
    • Un management plus compliqué dû aux habitudes, à la résistance au changement, au « poids de l’âge » (sic) »,
    • Une population qui est (qui risque d’être !) démotivée, attentiste parce que dépassée…

2. Désarroi et questionnement du senior

Trois paramètres relatifs à cette dimension sont à prendre en considération :

    1. Le sens : Ai-je réussi dans ma vie à réussir ma vie ?
    2. Le temps : le compte à rebours professionnel, personnel et financier devient primordial,
    3. Le champ des possibles : dans un environnement de « jeunisme », ai-je encore le choix … de faire des choix ?  Puis-je saisir les acquis de mon parcours (dans mon histoire et mon actualité) pour aller « vers autre chose » (reprise d’entreprise, création, Management de transition, temps partagé, etc.) ?   

3. Le Sentiment de Fin de Vie Professionnelle (SFVP)

Cet élément, trop souvent méconnu non dans son évocation mais dans ses causes et ses conséquences, mérite que nous nous y attardions tant il prend une signification particulière dans le contexte qui nous intéresse.

Indiquons en premier lieu que la notion de sentiment de fin de vie professionnelle fonde son utilité autour de trois facteurs principaux :

    1. Une volonté de comprendre l’exclusion des seniors,
    2. Le constat d’un manque de reconnaissance des seniors au travail,
    3. Une forte interrogation sur l’engagement des seniors dans leur activité professionnelle en regard de la place accordée à leur vie privée.

 Observons également que l’individu en proie au syndrome SFVP (la très grande majorité, soyons-en convaincus !) doit gérer trois types d’évolution physiques et psychiques :

    • Une modification liée au déclin biologique qui génère un certain nombre de bouleversements variablement ressentis selon les personnes et les environnements,  
    • Une adaptation aux milieux mouvants en lien ou non avec la modification sus évoquée,
    • Une interrogation plus prononcée (mais peu ou pas avouée !) sur le sens de la vie et sur la mort.

L’ensemble de ces éléments se manifeste certes différemment d’un individu à l’autre mais, parce qu’il faut bien tenter parfois de globaliser pour mieux expliquer, nous retiendrons six « catégories » de comportements qui nous semble couvrir la plus grande partie des observations réalisées :

    • Un désengagement POUR ET AU travail : l’on accomplit toujours, généralement, sa mission avec soin MAIS dans un « état d’esprit » qui n’est plus uniquement orienté vers le triptyque TRAVAIL / SALAIRE / RECONNAISSANCE,
    • Un recentrage sur soi : le senior relativise l’importance qu’il accorde à son image sociale et à l’influence que les autres ont sur lui,
    • Une évolution des rôles : le senior privilégie désormais les rôles familiaux et/ou non en lien direct avec le travail ; il modifie la nature et la place qu’il accordait à chaque sphère sociale (professionnelle, familiale et personnelle),
    • Une évolution des objectifs de vie : le senior entre dans une phase de changement d’aspirations, de désirs et donc d’objectifs ; ceux-ci concernent désormais la sphère privée,
    • Une évolution vers l’intégrité : le senior travaille sur l’acceptation de son unique cycle de vie ; la mort fait partie intégrante de sa réflexion sur son propre vieillissement,
    • Une acceptation de son âge : le senior en SFVP accepte plus ou moins facilement son appartenance à un groupe d’âge et donc à l’image de ce groupe ; il intègre ainsi (ou pas !!!) le processus inéluctable auquel il est soumis.

En situant ces considérations dans leur existence an sein de l’entreprise, il est intéressant de comprendre le lien étroit qui existe entre le mode de management tel qu’il peut exister dans l’entité et la congruence qu’il doit entretenir avec les paramètres évoqués dans les lignes qui précèdent ; si le maintien de la motivation, de l’engagement et donc de l’efficacité de la population concernée est  bien évidemment l’une des clés de la problématique (dans une recherche de l’éternel contrat gagnant / gagnant), la cohérence entre cette volonté et son application directe dans les méthodes et les outils ne peut être contournée.

Avant d’engager une réflexion prospective et opérationnelle sur les actions à mettre en œuvre et, surtout, sur le sens à leur donner dans le souci de la prédominance du POUR QUOI sur le QUOI ou le COMMENT, détaillons, pour clore provisoirement notre propos, les facteurs déclencheurs du SFVP dans une non prise en compte de ce dernier dans la gestion humaine d’une entreprise.

  • Insatisfactions liées à la perception de politiques RH discriminatoires :
  • Le taux de formation des « quinquas » est souvent inférieur à celui des « quadras » ou des cadres plus jeunes (pour ne citer que cette population),
  • La mobilité interne des seniors est plus réduite,
  • Etc.
  • Insatisfactions liées au travail lui-même :
  • Le senior a le sentiment de ne plus évoluer
  • L’entreprise ne l’associe pas ou ne lui propose pas de nouveaux projets,
  • Un sentiment de routine s’installe
  • Représentation « idéalisée » de la retraite :
  • Le senior croise de « jeunes » retraités heureux …
  • Il espère (ou plutôt, il espérait !!!!) toucher le jackpot lors d’un départ « négocié »…

Si l’on rajoute à cela la survenance ou le renforcement d’un sentiment d’impuissance ou d’inutilité très vite relayé par un fort ressenti d’injustice, si les messages adressés par la Direction et par le management présentent des contradictions notoires (« Nous sommes pour la promotion des seniors »  suivi de « mon pauvre Marcel, tout cela n’est plus de votre âge » …), si, comme nous l’avons hélas constaté, les contrôles « tatillons » se renforcent au motif d’une fiabilité virtuellement défaillante « eu égard à l’âge de la personne », alors oui, la gestion des seniors constituera un réel problème … sur lequel leur responsabilité reste à démontrer.

*Enquête ANACT 06/2011

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